Quels risques pour la santé des aidants familiaux et proches aidants ?
L’assistance régulière à un proche peut avoir des conséquences néfastes sur la santé mentale et physique, au point de s’oublier soi-même. Comment reconnaître les premiers signes d’épuisement ? Qui peut-on contacter pour obtenir de l’aide ? Laure Vezin, psychologue et coordinatrice de la plateforme de soutien et de répit de la Fondation Odilon Lannelongue, nous apporte des explications.
Situation des aidants en France
Selon le « Baromètre des aidants » de la Fondation April (2022), près d’un Français sur cinq est aidant, ce qui représente environ 11 millions de personnes. Parmi ces aidants, un tiers a entre 50 et 64 ans et 60 % sont des femmes. Ce constat met en évidence le rôle historique des femmes dans le domaine des soins, qui leur est toujours dévolu. Malheureusement, elles sont souvent invisibles et rarement reconnues à leur juste valeur, ce qui les oblige à tout gérer simultanément, au risque de mettre leur santé en danger.
Qu’est-ce qu’un aidant familial et un proche aidant ? Quelles sont les conséquences au quotidien ?
Un proche aidant est une personne qui apporte une aide non professionnelle à un proche dépendant de son entourage pour accomplir tout ou partie des activités de la vie quotidienne. Cela peut être un conjoint, un parent, un oncle, une cousine, une voisine ou même un ami. Selon les statistiques, un aidant sur cinq consacre au moins 20 heures par semaine à aider un proche et 27 % ne reçoivent l’aide d’aucun professionnel, ce qui entraîne du stress, de la fatigue, une charge mentale et un manque de temps. En effet, un tiers des aidants estiment avoir été obligés de démissionner de leur emploi pour assumer ce rôle. Marina Al Rubaée, co-auteure de l’ouvrage « Les proches aidants pour les nuls », explique que les aidants doivent assumer des tâches et des responsabilités qui les accaparent et qui peuvent devenir chronophages à force de se répéter. Cette situation finit par les alourdir et les épuiser, tant sur le plan physique que psychique, mettant ainsi leur santé en jeu.
Les problèmes et les difficultés rencontrés par les aidants
Être aidant n’est pas un choix, mais quelque chose qui s’impose à eux. Laure Vezin, psychologue, souligne que la plupart des aidants se retrouvent dans cette situation de manière subie plutôt que choisie, car personne d’autre ne peut prendre en charge la situation ou parce que cela représente une dépense financière impossible à assumer.
L’oubli de soi
De nombreux aidants s’ignorent ou s’oublient eux-mêmes. Ils glissent progressivement dans cette situation, notamment lorsque celle-ci s’installe progressivement dans le temps. Un témoignage sur le site gouvernemental pour-les-personnes-agees.gouv.fr raconte comment une personne s’est rendu compte qu’elle était aidante lorsqu’elle a participé à un café des aidants suite au diagnostic de la maladie de sa mère. C’est lors de ce café qu’elle a découvert qu’elle était également aidante pour son fils atteint d’une maladie génétique rare dégénérative.
L’isolement social et affectif
En raison des nombreuses tâches à accomplir après une journée de travail, de nombreux aidants n’ont plus l’énergie nécessaire pour maintenir leurs relations amicales, sortir ou pratiquer des activités sociales. Cela conduit à un isolement social, comme l’a constaté Laure Vezin.
L’épuisement
La situation d’aidance peut conduire à l’épuisement si aucune mesure n’est prise pour y remédier. Laure Vezin explique que devenir aidant implique un fardeau objectif, tel que l’habillage du proche, la préparation des repas, l’assistance dans les activités quotidiennes, ainsi qu’un fardeau subjectif, qui comprend la culpabilité, la peur de mal faire ou de ne pas en faire assez. Petit à petit, l’aidant perd son énergie.
La précarité économique
Le rôle d’aidant est souvent attribué aux femmes, ce qui peut conduire à une précarité économique. Marina Al Rubaée affirme que les femmes, en tant que piliers de la famille, doivent gérer de nombreuses responsabilités simultanément, ce qui peut entraîner un surmenage. Cela peut également entraîner des conséquences telles qu’une privation du droit à la retraite, un éloignement du monde du travail, un isolement social et même des divorces ou des séparations. Un exemple donné est celui d’une infirmière qui a dû arrêter son activité professionnelle pour aider son père victime d’un AVC.
Le syndrome de l’aidant
Aider un proche au quotidien, tout assumer sans demander d’aide peut entraîner un épuisement et un burn-out. Le syndrome de l’aidant se manifeste par des signes tels que le stress chronique, les troubles du sommeil, la fatigue physique importante, les douleurs dorsales ou les maux de ventre.
Aide disponible pour les aidants
Afin de prévenir l’épuisement, il est essentiel de ne pas dépasser ses limites, de s’écouter et de prendre du temps pour soi. Laure Vezin recommande de demander de l’aide à des professionnels tels que les auxiliaires de vie, les travailleurs sociaux et les professionnels de santé. Les aidants peuvent également bénéficier du soutien d’un psychologue, participer à des groupes de parole ou fréquenter des cafés des aidants, qui sont des dispositifs mis en place par l’association française des aidants. Il est important de ne pas rester seul et de se renseigner sur les aides disponibles à proximité. De plus, il est possible de demander un congé pour proche aidant à son employeur et de bénéficier du droit au répit, comme un accueil de jour pour la personne aidée ou un hébergement temporaire en Ehpad.